PHONOGRAPHÉMATIQUE CRÉOLE

Aux aurores du tournant phonologique

Ce système, élaboré entre 1940 et 1943, entend établir des règles systématiques pour la représentation de toutes les formes du créole et non plus pour une partie seulement d'entre elles comme c'était le cas jusqu'à présent. On doit la première graphie phonologique à Ormonde Mac Connell, un pasteur d'origine irlandaise, et Franck Laubach, un spécialiste américain de l'alphabétisation : d'où le nom de cette graphie « McConnell-Laubach ». La graphie phonologique ne prend pas comme point de départ l'orthographe française, mais se concentre sur la prononciation créole : elle se fixe pour principe fondateur que l'on doit écrire ce que l'on entend et uniquement ceci. Cela débouche sur le principe de la bi-univocité : la relation entre un phonème et sa représentation graphique est dite bi-univoque, car un phonème est toujours représenté par la même lettre (ou combinaison de lettres) et inversement, une lettre (ou combinaison de lettres) renvoie toujours au même phonème. Par exemple, le phonème [s] est toujours représenté par la lettre ‹ s › et dès que l'on voit la lettre ‹ s › on sait automatiquement qu'on doit toujours la prononcer [s]. Sur ce point, on rompt totalement avec le français où le phonème [s] peut s'écrire de différentes façons (savoir, scier, tousser, cinéma, maçon) et où le graphème ‹ s › peut renvoyer à un autre son (dans le mot « pose », le ‹ s › se prononce [z]).

En 1947, Charles–Ferdinand Pressoir et L. Faublas soumettent une liste de modifications à apporter à la graphie phonologique. Dans le détail, la nouvelle graphie Pressoir-Faublas diverge peu de la graphie McConnell-Laubach. Mais dans la mesure où la première graphie phonologique avait été mal accueillie par l'élite haïtienne, Pressoir et Faublas ont proposé, tout en conservant le principe de la bi-univocité, de se rapprocher un peu plus de certaines conventions de l'orthographe française pour la représentation physique des sons. Sur une liste de quelque 40 correspondances phonème/graphème, 13 changent d'une graphie à l'autre.

Revue et corrigée dans les années qui suivirent, la graphie Pressoir-Faublas est mieux connue sous le nom de graphie ONAAC, du nom de l'organisme ayant fait les suggestions de modification (Office National d'Alphabétisation et d'Action Communautaire).

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