John Locke : L'identité personnelle
Extrait de « Essai sur l'entendement humain » - John Locke
En effet, puisque c'est la même conscience qui fait qu'un homme est lui-même à ses propres yeux, l'identité personnelle dépend de cette conscience seule, qu'elle soit annexée à une seule substance individuelle, ou qu'elle ait la possibilité de durer à travers une succession de substances diverses. Car dans la mesure où un être intelligent peut reproduire l'idée de n'importe quelle action passée avec la même conscience qu'il en avait à l'époque et y ajouter la même conscience qu'il a de n'importe quelle action présente, dans cette mesure il est le même soi personnel. Car c'est par la conscience qu'il a de ses pensées et de ses actions présentes qu'il est maintenant soi pour soi-même ; et ainsi, il demeurera le même soi, dans la limite des actes passés et à venir que peut couvrir la même conscience. Par l'écoulement du temps ou par le changement de substance, il ne serait pas deux personnes, pas plus qu'un homme ne deviendrait deux hommes en portant après la coupure d'un sommeil plus ou moins long des vêtements différents de ceux d'hier. C'est en effet la même conscience qui unit des actions séparées en une même personne, quelles que soient les substances qui ont participé à leur production.